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Manger à la cantine

Les décodeurs du parrainage : Épisode 5

décodeur 5

Selon l’Organisation pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), on parle d’insécurité alimentaire lorsqu’une personne ne peut accéder de manière régulière et suffisante à des aliments à la fois sains et nutritifs.

La mise en place de cantines scolaires dans la quasi-totalité des pays du monde est une formidable avancée pour combattre la malnutrition. Cependant, on estime en 2022 que 73 millions d'enfants parmi les plus vulnérables en restent exclus sur le terrain (UNESCO). Un constat dramatique quand on sait que beaucoup d’enfants dépendent de la cantine comme unique source de nourriture quotidienne.

Pourquoi la mise en place de cantines scolaires est compliquée dans certaines régions du monde ? Quelles sont, d’après nos experts, les conséquences sur la santé ou l’éducation lorsqu’un enfant n’a pas accès à un repas à l’école ? Quelles solutions peuvent être mises en place concrètement ? Et qu’en pensent les enfants, principaux concernés, sur le terrain ?

Direction Madagascar, Haïti, l’Éthiopie, l’Indonésie et le Vietnam pour découvrir comment les cantines peuvent changer concrètement et durablement la vie de milliers d’enfants !

Pourquoi ce n'est pas si simple ?

manque de moyen pour manger

Dans les régions où nous intervenons, manger à la cantine scolaire reste encore inaccessible pour beaucoup d’enfants. Zoom sur les principaux (mais non exhaustifs…) freins que rencontrent les familles au quotidien :

La très grande pauvreté des familles

Si le coût de l’accès à l’éducation est déjà un enjeu dans de nombreux pays du monde, la cantine scolaire représente un surcoût que ne peuvent assumer de nombreuses familles. Par exemple, certaines familles que nous soutenons en Indonésie ou encore au Sénégal vivent avec l’équivalent de moins de 100€ par mois. Il leur est impossible de dépenser ne serait-ce qu’un euro pour inscrire chacun de leurs enfants à la cantine et peinent à trouver d’autres solutions pour leur assurer un repas quotidien à la maison.

Le manque de moyens des collectivités locales et des écoles

Dans de nombreuses régions du monde, notamment les plus isolées, il n’y a parfois aucune école à proximité des villages. Les collectivités n’ont pas les ressources nécessaires pour construire des écoles et les faire fonctionner. Sans école, les enfants ne peuvent ni être scolarisés, ni bénéficier de cantine. Pour en savoir plus sur l’accès à l’éducation, retrouvez les Décodeurs N°3 « Aller à l’école ».

cantine scolaire haiti
Une cantine scolaire en Haïti

Quand les écoles fonctionnent au sein des communautés que nous soutenons, financer une cantine scolaire peut être tout simplement impossible. Construire un lieu adapté pour cuisiner, embaucher du personnel assurant la préparation et le service des repas, acheter du matériel de cuisine, des couverts, se fournir en ressources naturelles ou s’équiper pour conserver, chauffer, cuire, ou faire bouillir (électricité, bois de chauffe…), cela a un coût souvent difficile à assumer pour les écoles qui ont souvent peu de moyens pour assurer leur fonctionnement général. A cela se rajoute le coût des aliments comme la viande, le riz, ou encore les légumes qui peut devenir trop élevé.

Le manque d’accès à l’eau

De nombreux villages ne disposent pas d’un accès à l’eau et ce sont souvent les enfants qui sont chargés de la corvée d’eau (aller chercher de l’eau pour toute la famille). Bien souvent, les écoles ne sont pas équipées en installations d’eau : en 2022, près de 584 millions d'enfants avaient un accès limité ou inexistant à l’eau potable en milieu scolaire (Unesco). Ce manque d’accès à l’eau ne permet pas à une cantine scolaire de fonctionner convenablement, et aux enfants de boire suffisamment.

Pour en savoir plus sur l’accès à l’eau, retrouvez les Décodeurs N°2 « Aller chercher de l’eau… potable ». 

Paroles d'experts

enfants expert cantine

Plusieurs millions d’enfants à travers le monde dépendent de la cantine scolaire pour pouvoir manger au moins un repas chaque jour. Au-delà de ce constat éloquent, nous allons voir que les enjeux pour les enfants sont considérables en termes de santé, d’éducation et de protection.

Des risques sanitaires majeurs pour les enfants

L’Ethiopie est un des pays particulièrement touchés par la sécheresse et doit régulièrement faire face à de profondes crises alimentaires de plus en plus fréquentes et longues. Getachew Tesfaye, infirmier qui travaille aux côtés de Childfund Ethiopia à Addis-Abeba témoigne : « nous menons actuellement une campagne de dépistage de la malnutrition chez tous les enfants des villages environnants. Nous découvrons généralement quatre à cinq cas par jour ».

infirmier ethiopie

En l’absence de cantine, les risques de malnutrition et de famine s’accentuent. En période de soudure (1), d’importantes carences en micronutriments (vitamines, minéraux et oligo-éléments) entraînent une dénutrition, IMC (2) faible, des retards de croissance et maigreurs extrêmes, des infections, une diminution de la résistance des enfants face aux maladies et, malheureusement, des risques importants de décès. En effet, plus fragilisés, les enfants en situation de malnutrition aigüe sévère ont un risque 9 fois plus élevé de mourir d’une maladie comme la diarrhée ou la rougeole (Unicef, 2017).

Risque sanitaire lié au manque d’accès à l’eau

Manger à la cantine oui, mais pas dans n’importe quelles conditions !

Les établissements ne permettant pas d’assurer des normes d’hygiènes font courir des risques pour la santé des élèves. Sans eau potable, il n’est pas possible de proposer aux enfants de boire et sans eau, d’assurer le nettoyage des aliments et des ustensiles, la cuisson ou encore le lavage des mains des enfants et des équipes éducatives avant et après chaque repas. Le risque majeur de déshydratation ou de maladies telles que les diarrhées ou le choléra, est omniprésent et, dans beaucoup de cas, peut s’avérer mortel.

En savoir plus sur les problématiques d’accès à l’eau dans le 2e épisode Les Décodeurs N°2 « Aller cherche de l’eau… potable ».

Risque accru de crise alimentaire en cas de catastrophes naturelles, d’instabilités politiques ou de pandémies

Selon le PAM (Programme Alimentaire Mondial, 2022), 1,4 million d'enfants souffrent de malnutrition aiguë, et ces chiffres augmentent davantage dans les zones touchées par les catastrophes naturelles. Sècheresse en Éthiopie, inondations en Indonésie, séismes en Haïti, cyclones à Madagascar, etc. Lorsque la situation d’une région déjà vulnérable se dégrade, l’accès à la nutrition va être considérablement impacté, car les récoltes sont anéanties et deviennent insuffisantes pour assurer la sécurité alimentaire de tous.

Les conflits armés - comme en Haïti, ou au Sri Lanka - et les guerres - comme en Ukraine - entraînent également de fortes inflations, des pénuries ou encore un important déplacement des familles, ce qui augmente, là encore, le risque de crise alimentaire.

Dans ces situations, les écoles ferment leurs portes, et celles encore ouvertes n’ont plus la possibilité de garantir le maintien d’une cantine scolaire. De nombreuses familles n’ont alors pas d’autre possibilité pour nourrir convenablement leurs enfants.

Autre exemple éloquent : pendant la pandémie de Covid-19, la fermeture des écoles, en avril 2020, a contraint 1,6 milliard d’enfants et de jeunes à cesser d’aller à l’école. Ce sont près de 369 millions d’enfants qui dépendent normalement des repas scolaires comme source de nutrition quotidienne qui ont été directement affectés (ONU).

Les décodeurs

Risque de déscolarisation et de maintien du cercle vicieux de la pauvreté

Quand les enfants arrivent à l’école le ventre vide, ils sont plus fatigués et ont davantage de difficultés à se concentrer. Lorsqu’il n’existe pas de cantine au sein de leur école, leur capacité d’apprentissage est fortement altérée. Le midi, ils doivent retourner chez eux pour manger et ne reviennent pas en cours l’après-midi car, bien souvent, les distances à pied sont trop longues et fatigantes, notamment pour les plus petits.

De fait, le taux d’absentéisme et de décrochage scolaire explosent et nombre d’enfants terminent leur scolarisation sans savoir suffisamment lire, écrire et compter.

Chloé BAURY, Chargée de programme Un Enfant par la Main à Madagascar, nous explique comment l’absence d’une cantine scolaire peut avoir un impact sur l’augmentation du travail des enfants

En période de soudure (1), avec les difficultés financières, le manque de réserves stockées et la flambée des prix des aliments et de l’énergie (matériaux pour chauffer), les familles ne peuvent pas toujours offrir un repas par jour à leurs enfants. Souvent, les enfants sont contraints de quitter l’école pour trouver un travail journalier et aider financièrement leur famille.

chloé baury

L’absence de cantines scolaires a un impact important sur la poursuite des études de certains enfants et leur protection de toute forme d’exploitation. Une telle situation contribue malheureusement à entretenir le cercle vicieux de la pauvreté : des enfants déscolarisés ont, une fois adultes, une plus faible capacité de revenus et peuvent, plus difficilement, contribuer au développement économique et à l’autonomie de leur famille et de leur village.

Dans les coulisses de l'Association

Les cantines scolaires, en garantissant un repas sain et équilibré aux enfants, permettent d’apporter des réponses concrètes au problème de nutrition, de scolarisation et de pauvreté dans les régions du monde que nous soutenons. Tour d’horizon des solutions qui peuvent vraiment changer les choses pour des milliers d’enfants !

La construction, la réfection et l’équipement de cantines scolaires pour combattre la dénutrition et renforcer l’accès de qualité à l’école.

Au-delà d’améliorer sensiblement la santé des enfants, la cantine leur permet de mieux développer leur potentiel d’apprentissage et leur autonomie future. Les parents sont beaucoup plus enclins à scolariser leurs enfants lorsqu’un repas est proposé, ce qui a un effet vertueux pour lutter contre le travail des enfants. Selon l’ONU, les repas scolaires augmentent le taux de scolarisation et le taux de fréquentation de respectivement 9 % et 8 % !

L’installation de citernes dans les écoles pour assurer l’accès à une eau potable et un niveau d’hygiène satisfaisant

Les enfants peuvent boire en toute sécurité et le temps du repas devient aussi l’occasion de sensibiliser les enfants et leurs professeurs aux gestes d’hygiène avec la mise en place du rituel du lavage des mains. Les enfants sont ainsi mieux armés pour faire barrière aux virus respiratoires comme la covid-19 et d’autres d’infections intestinales telles que la diarrhée.

Cantines scolaire et parents d'élève

Le renforcement, la participation des parents et des équipes pédagogiques.

Par exemple, à Madagascar, les parents ont mis en place un petit tableau de roulement, affiché dans l’école, pour que chaque jour les repas soient préparés, servis et pour assurer le nettoyage nécessaire. Comme cela est participatif, le coût de la cantine est considérablement diminué pour les familles !

La formation des équipes pédagogiques et des parents aux valeurs nutritives des aliments pour assurer des repas sains à l’école… mais aussi à la maison !

Par exemple, à Madagascar, les parents ont mis en place un petit tableau de roulement, affiché dans l’école, pour que chaque jour les repas soient préparés, servis et pour assurer le nettoyage nécessaire. Comme cela est participatif, le coût de la cantine est considérablement diminué pour les familles !

Cantines scolaire et cuisine nutritive

L’achat de matières premières, d’ingrédients et d’ustensiles pour soutenir l’économie locale.

En favorisant les achats localement, le fonctionnement des cantines scolaires renforce le développement de petits agriculteurs et du tissu économique environnant. Là encore, c’est tout un village qui y gagne !

Un moment de détente, de partage et de convivialité à ne pas négliger !

En plus de donner les forces nécessaires aux enfants pour apprendre, le repas est aussi un moment de détente et de sociabilisation très important pour les enfants. En ritualisant la « pause méridienne », la cantine permet aux enfants d’apprendre à ranger, partager, respecter les autres et être autonomes. De plus, avoir la garantie d’un plat chaud chaque jour favorise le bien-être des enfants et diminue considérablement leur sentiment d’insécurité.

En savoir plus sur les problématiques d’accès au bien-être des enfants dans Les Décodeurs N°4 « S’amuser ». 

maria et ses amies cuisinent

Regards d'enfants

« Qu’est-ce que tu as mangé à l’école ? » est une question que posent de nombreux parents à leurs enfants.

Récemment, nous avons rencontré Miraritiana, Marielle, Fanampiny Gabin, Fanampiny Emma, scolarisés en primaire au sein du programme Vahatra d’Un Enfant par la Main à Madagascar.
Ils nous donnent leur avis sur leur cantine et leurs plats préférés !

Quels sont les changements que tu as constatés depuis l'existence de la cantine ?

J’ai plus envie d’aller à l’école. Je suis en bonne santé et je peux jouer aussi plus longtemps avec mes amis. 

Miraritiana, 8 ans en CE2 à l’école Primaire Publique Antanetibe.

 Je me sens plus en santé et moins fatiguée puisque je ne suis plus obligée de revenir à la maison à midi quand on a classe l'après-midi. Et je suis contente car je passe aussi plus de temps avec mes copines. 

Marielle, 9 ans en CM1 à l’école Primaire Andranonahoatra.

Je mange des repas chauds et je suis plus concentré en cours. 

Fanampiny Romeo Gabin, 13 ans en CM2 à l’école Primaire Andranonahoatra.

témoignages enfants madagascar

Qu’est-ce que tu manges à la cantine ?

Des haricots, des carottes, de la viande, des brèdes, des concombres, des haricots verts, des œufs, des pommes de terre, des bananes et des ananas, et ce que je préfère, c'est la soupe de légumes !

Marielle

Des brèdes, de la viande, des carottes et des haricots, des œufs, des bananes et j’adore quand il y a de la viande ou des œufs.

Fanampiny Sahaza Emma, 12 ans en CM2 à l’école Primaire Andranonahoatra.

Il y a-t-il une différence entre le repas que tu consommes à la maison et celui à la cantine ?

À la cantine, les repas sont différents tous les jours et on a toujours des desserts. Parce qu’à la maison on n'a jamais de dessert après le repas. 

Fanampiny Romeo Gabin

Quand je vais à la cantine, c'est toujours bon et on mange des repas chauds et surtout de la viande. 

Marielle

À la cantine, les repas sont bons et il y a beaucoup à manger ! Et j'aime la cantine parce que le met change tous les jours et en plus, on a des desserts tous les jours. »

Fanampiny Sahaza Emma

enfants madagascar cantine

La bonne nouvelle !
Le projet de cantines scolaires 2022 mis en place dans 11 écoles des districts d’Ambohidratrimo et Ankazobe, à Madagascar, porte ses fruits puisque 104 enfants en situation de malnutrition sévère ou modérée sont passés à un état nutritionnel normal. Pour les autres enfants malnutris en début de projet, il y a au moins eu un gain de poids et aucun cas de régression.

mots clés

En parrainant un enfant, vous contribuez à faire respecter et appliquer le droit de chaque enfant à une nutrition saine et complète. 
Merci pour votre soutien !

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Offrir des soins

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Agir contre la faim

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Protéger des violences

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Scolariser et former

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Donner de l’eau